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| Transcription artisanale et singulière établie d'après la version sonore originale disponible en archive sur Lutecium | |
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Je recommence donc, je recommence puisque j'avais
cru pouvoir finir. Qu'est-ce qu'il y a ? Je recommence même parce
que j'avais cru pouvoir finir. Ça sonne drôlement, hein ? C'est un
petit air de ma façon. Il est en effet bien clair que le travail, tel que nous le connaissons par l'inconscient, c'est ce qui fait des rapports, des rapports à ce savoir dont nous sommes tourmentés, c'est ce qui fait de ces rapports la jouissance. Donc j'ai dit : pas d'objection à ce que j'imagine. Je n'ai pas dit "je m'imagine". C'est vous qui vous imaginez comprendre. C'est-à-dire que dans ce "vous-vous", vous imaginez que c'est vous qui comprenez, moi je n'ai pas dit que c'était moi, j'ai dit "j'imagine". Quant à ce que vous vous imaginiez, j'essaye de tempérer la chose. Je fais tout ce que je peux, en tout cas, pour vous en empêcher. Parce qu'il ne faut pas comprendre trop vite, comme je l'ai souvent souligné. Ce que j'ai avancé, pourtant, avec ce "j'imagine",
à propos du sens, c'est une remarque qui sera celle que j'avance
cette année. C'est que l'imaginaire, quoi que vous en ayez entendu,
parce que vous vous imaginez comprendre, c'est que l'imaginaire, c'est
une "dit-mansion", comme vous savez que je l'ai écrit, aussi
importante que les autres. Ça se voit très bien dans la
science mathématique. Je veux dire dans celle qui est enseignable
parce qu'elle concerne le réel que véhicule le symbolique.
Qui ne le véhicule d'ailleurs que de ce qui constitue le symbolique,
ce soit toujours chiffré. L'imaginaire c'est ce qui arrête
le déchiffrage, c'est le sens. Comme je vous l'ai dit, il faut
bien s'arrêter quelque part, et même le plus tôt qu'on
peut. C'est très joli de voir comment cette affaire,
qui est peut-être, enfin certains d'entre vous doivent en avoir
entendu vaguement parler, je peux leur affirmer en tout cas, que c'est
vraiment le dernier grand pas de la mathématique, ça part
comme ça d'une intuition philosopharde l'Ausdehnungslehre :
la math, Lehre, c'est ce qui s'enseigne, la math de l'extension,
qu'il appelle ça, Grassmann. Et puis il sort de là l'espace
vectoriel et le calcul du même nom, n'est-ce pas, c'est-à-dire
quelque chose de tout à fait mathématiquement enseignable,
si je puis dire, de strictement symbolisé, et qui, à la
limite, enfin, peut... peut fonctionner dans, par une machine, hein ?
Singulièrement, je vous la dirai : c'est qu'il y a trois dimensions de l'espace habité par le parlant et que ces trois dit-mansions, telles que je les écris, s'appellent le Symbolique, l'Imaginaire et le Réel. C'est pas tout à fait comme les coordonnées cartésiennes, c'est pas parce qu'il y en a trois, ne vous y trompez pas. Les coordonnées cartésiennes relèvent de la vieille géométrie. C'est parce que... c'est parce que c'est un espace, le mien, tel que je le définis de ces trois dit-mansions, c'est un espace dont les points se déterminent tout autrement. Et c'est ce que j'ai essayé, comme ça dépassait peut-être mes moyens, c'est peut-être ça qui m'a donné l'idée de laisser tomber la chose, c'est une géométrie où les points, pour ceux qui étaient là, j'espère, l'année dernière, dont les points se déterminent du coinçage de ce dont vous vous souvenez peut-être, que j'ai appelé "mes ronds de ficelle". Parce qu'il y a peut-être un autre moyen que de faire un point, que de commencer par scier l'espace et puis ensuite déchirer la page, et puis avec la ligne qui, on ne sait pas d'où, flotte entre les deux, casser cette ligne et dire : c'est là le point, c'est-à-dire nulle part, c'est-à-dire rien. C'est peut-être s'apercevoir que, rien qu'à en prendre trois de ces ronds de ficelle tel que je vous l'ai expliqué, quand ils sont trois, bien que si vous en coupiez un, les deux autres ne sont pas liés, ils peuvent, rien que d'être trois, avant ce trois les deux restant séparés, rien que d'être trois, se coincer de façon à être inséparables... D'où le coinçage. Le coinçage s'écrit quelque chose comme ça : à savoir, que si vous tirez quelque part sur un quelconque de ces ronds de ficelle, vous voyez qu'il y a un point, un point qui est "quelque part par là" où les trois se coincent.
C'est un petit peu différent de tout ce
qu'on a élucubré jusqu'ici more geometrico, car ça
exige, car ça exige qu'il y ait trois ronds, trois ronds de ficelle,
quelque chose d'autrement consistant que ce vide avec lequel on opère
sur l'espace. Je vous réexpliquerai ça mieux encore, c'est-à-dire en long et en large, mais je vous fais remarquer que ça part, ça part, cette notion, d'une autre façon d'en opérer avec l'espace, avec l'espace que nous habitons réellement... si l'inconscient existe. Je pars d'une autre façon de considérer l'espace et qu'en qualifiant ces trois dimensions, en les épinglant des termes mêmes que j'ai paru jusqu'ici fortement différencier des termes de Symbolique, d'Imaginaire et de Réel, ce que je suis en train d'avancer, c'est qu'on peut les faire strictement équivalents. C'est une question que se pose Freud à la fin de la Science des rêves, à l'avant-dernière page : il se pose la question de ce en quoi ce qu'il appelle, et on voit bien qu'il ne l'appelle plus avec tellement de certitude, qu'il ne l'épingle plus de quelque chose qui la séparerait, ce qu'il appelle réalité, qu'il qualifie de "psychique": qu'est-ce que ça peut avoir à faire avec le réel ? Alors là, il vacille, il vacille encore un peu, et il s'accroche à la réalité matérielle, mais qu'est-ce que ça veut dire, la "réalité matérielle" dans ses rapports avec la "réalité psychique" ? Nous allons donc, nous allons donc essayer de les distinguer, de garder encore une once de distinction entre ces trois catégories, tout en marquant ce que je mets à l'ordre du jour, à savoir de bien marquer que, comme dimensions de notre espace, notre espace habité en tant qu'êtres parlants, ces trois catégories sont strictement équivalentes. On a déjà pour ça le truc, hein ! On les désigne par des lettres. C'est là le frayage tout à fait nouveau de l'algèbre et vous voyez là l'importance de l'écrit. Si j'écris R.I.S., Réel, Imaginaire, Symbolique, hein ou mieux : Réel, Symbolique, Imaginaire, vous verrez tout à l'heure pourquoi je corrige, vous les écrivez en lettres majuscules, vous ne pouvez pas faire autrement, et il reste pour vous comme ça, adhérant en quelque sorte à la chose, simplement question d'écriture, c'est tout à fait hétérogène, vous allez continuer comme ça parce que vous avez toujours compris, vous avez toujours compris mais à tort... que, que le progrès, le pas en avant, c'était d'avoir marqué l'importance écrasante du Symbolique au regard de ce malheureux Imaginaire par lequel j'ai commencé, j'ai commencé en tirant dessus à balles, enfin, sous le prétexte du narcissisme, seulement figurez-vous que, que l'image du miroir, c'est tout à fait réel qu'elle soit inversée. Et que même avec un noeud, surtout avec un noeud, et malgré l'apparence car vous imaginez peut-être qu'il y a des noeuds dont l'image dans le miroir peut être superposée au noeud lui-même... Il n'en est rien. L'espace, j'entends l'espace, comme ça,
intuitif, géométrique, est orientable. Il y a un noeud lévogyre et un noeud dextrogyre. Ce qu'il suffit, c'est que le Réel, lui, reste avant. Eh bien, ce qui réalise le Symbolique de l'Imaginaire, qu'est-ce
que c'est d'autre que la religion ? L'Imaginaire n'a donc pas à être placé à un quelconque rang. C'est l'ordre qui importe, et dans l'autre ordre, dextrogyre, curieusement vous avez la formule a, c, b, moyennant quoi c'est au second temps que c vient en tête, mais b est avant a, et au troisième temps, c'est b, a, c, c'est-à-dire trois termes dont nous verrons que, s'ils ne comptent pas pour peu dans le discours, ça n'en est pas moins là d'où sortent quelques structurations distinctes qui sont justement toutes celles dont se supportent d'autres discours, ceux seulement que les discours lévogyres permettent, de par l'espace qu'ils déterminent, de démontrer, non pas certes comme n'ayant eu un temps leur efficacité, mais comme à proprement parler mis en cause par les autres discours. Et je ne fais preuve là d'aucune partialité, puisque je nous mets du même côté où la religion fonctionne. Je n'en dirai pas plus aujourd'hui. Mais ce que j'avance est ceci : si dans la langue la structure, il faut l'imaginer, est-ce que ce n'est pas là ce que j'avance par la formule : les non-dupes errent ? Comme ça n'est pas immédiatement accessible, je vais essayer de vous le montrer. Il y a quelque chose dans l'idée de la duperie, c'est qu'elle a un support : c'est la dupe. Il y a quelque chose d'absolument magnifique dans cette histoire de la dupe, c'est que la dupe, si je puis, si vous me le permettez, la dupe est considérée comme stupide. On se demande vraiment pourquoi. Si la dupe est vraiment ce qu'on nous dit, je parle étymologiquement, ça n'a aucune importance, si la dupe, c'est cet oiseau qu'on appelle "la huppe", la huppe parce qu'elle est huppée, naturellement rien ne justifie que huppée ça se dise la huppe, il n'en reste pas moins que c'est comme ça qu'elle est appréciée dans le dictionnaire, la dupe, c'est l'oiseau, paraît-il, qu'on prend au piège, qu'on prend au piège, justement de ce qu'elle soit stupide. On ne voit absolument pas pourquoi une huppe serait plus stupide qu'un autre oiseau, mais la chose qui me paraît remarquable, c'est l'accent que met le dictionnaire pour préciser qu'elle est du féminin. La dupe est "la". Il y a quelque part un machin que j'ai relevé, que j'ai relevé dans le Littré : que ce soit une faute, que La Fontaine ait fait dupe masculin. Il a osé écrire quelque part : Du fil et du soufflet pourtant embarrassé, "Ceci est tout à fait fautif, marque bien le Littré, on ne dit pas un dupe, pas plus qu'on ne peut dire un linotte pour qualifier un étourdi." Voilà une forte raison. L'intéressant, c'est, c'est de savoir de quel genre est "le non-dupe". Vous voyez ! Je dis tout de suite : le non-dupe, est-ce que c'est parce que, ce qui est pointé du non, c'est neutre ? Je n'en trancherai pas ; mais il y a une chose en tout cas claire, c'est que le pluriel d'être non marqué fait vaciller complètement cette référence féminine. Et il y a quelque chose, enfin, qui est encore plus drôle, que j'ai, je ne peux pas dire que j'ai trouvé dans Chamfort, j'ai trouvé aussi dans le dictionnaire, dans un autre, cette citation de Chamfort, parce que je ne passe pas mon temps à lire Chamfort mais c'est quand même pas mal, enfin que ce soit au mot "dupe" que j'ai relevé ceci : "Une des meilleures raisons, écrit Chamfort, qu'on puisse avoir de ne se marier jamais, ah ! c'est qu'on n'est pas tout à fait la dupe d'une femme tant qu'elle n'est pas la vôtre." La vôtre ! Votre femme, ou votre dupe ! Ça, c'est quelque chose quand même qui paraît, enfin... éclairant, hein ? Le mariage comme duperie réciproque. C'est bien en quoi je pense que le mariage, c'est l'amour : les sentiments
sont toujours réciproques, ai-je dit. Alors... Si le mariage l'est
à ce point-là... C'est pas sûr, hein ! Enfin, si je
me laissais un peu aller à la glissade, je dirais que, c'est ce
que veut dire Chamfort aussi sans doute, une femme ne se trompe jamais.
C'est en quoi la fonction de l'épouse n'a rien d'humain. Nous approfondirons ça une autre fois. J'ai parlé du non-dupe. Et je semble l'avoir marqué, enfin, d'une irrémédiable faiblesse, en disant que... que ça "erre". Seulement, il faudrait bien savoir ce que ça veut dire : "ça erre". Je vous ai déjà tout à l'heure un petit peu indiqué que, qu'errer enfin, vous allez vous reporter quand même au dictionnaire Bloch et von Wartburg parce que je ne vais pas passer mon temps à vous faire de l'étymologie, n'est-ce pas, sachez simplement que... il y a, y a quelque chose que l'étymologie, ce qui veut dire simplement pointer l'usage au cours des temps, que l'étymologie rend parfaitement manifeste, n'est-ce pas, c'est que, exactement comme dans mon titre les Non-dupes errent et les Noms du père, hein, c'est exactement la même chose pour le mot "erre", ou plus exactement pour le mot "errer". "Errer" résulte de la convergence de error (erreur) avec quelque chose qui n'a strictement rien à faire et qui est apparenté à cette erre dont je vous parlais tout à l'heure, qui est strictement le rapport avec le verbe iterare. Iterare en plus, car si ce n'était que ça, ce ne serait rien ! Iterare en plus, est là uniquement pour iter, ce qui veut dire voyage. C'est bien pour ça que le chevalier errant est simplement un chevalier itinérant. Seulement, quand même, errer vient de iterare qui n'a rien à faire avec un voyage, puisque ça veut dire répéter, de iterum (re-) ! Néanmoins, on ne se sert de cet iterare que pour ce qu'il ne veut pas dire, c'est-à-dire itinerare, comme le démontrent les développements qu'on a donnés à ce verbe errer au sens d'errance, c'est-à-dire en faisant du chevalier errant un chevalier itinérant. Eh bien, c'est là la pointe de ce que j'ai à vous dire, considérant la différence, la différence qui se... s'épingle de ce qu'il en est des non-dupes. Si les non-dupes sont ceux ou celles qui se refusent à la capture de l'espace de l'être parlant, si ce sont ceux qui en gardent, si je puis dire, leurs coudées franches, il y a quelque chose qu'il faut savoir imaginer, c'est l'absolue nécessité qui en résulte, d'une, non pas errance, mais erreur. C'est à savoir que pour tout ce qui est de la vie et du même coup de la mort, il y a une imagination qui ne peut que supporter tous ceux qui de la structure se veulent non-dupes, c'est ceci : c'est que leur vie n'est qu'un voyage. La vie, c'est celle du viator. Ceux qui dans ce bas monde, comme ils disent, sont comme à l'étranger. La seule chose dont ils ne s'aperçoivent pas, c'est rien qu'à faire surgir cette fonction de l'étranger, ils font resurgir du même coup le tiers terme, la troisième dimension, celle grâce à quoi des rapports de cette vie, ils ne sortiront jamais, si ce n'est d'être alors plus dupes encore que les autres de ce lieu de l'Autre, pourtant qu'avec leur Imaginaire ils constituent comme tel. L'idée de genesis, de développement comme on dit, de ce qui serait je ne sais quelle norme, grâce à quoi un être qui ne se spécifie que d'être parlant, dans tout ce qu'il en est de ses affects justement, qu'il serait commandé par je ne sais quoi que quiconque est bien incapable de définir, qui s'appelle le développement. Et c'est à quoi, en voulant réduire l'analyse, on manque, on fait l'erreur complète, l'erreur radicale quant à ce qu'il en est de ce que découvre l'inconscient. S'il y a quelque chose que nous dit Freud et là, c'est sans ambiguïté : "Und (c'est le dernier paragraphe de la Traümdeutung) der Wert des Traumes für die Kenntnis der Zukunft". Et c'est là que c'est bien joli. Parce qu'on croit qu'en écrivant ceci, Freud fait allusion à la fameuse valeur de divination des rêves. Mais ne pouvons-nous pas le lire autrement ? C'est-à-dire nous dire et la valeur du rêve pour la connaissance de ce qui va en résulter dans le monde, de la découverte de l'inconscient. C'est à savoir, si, par hasard, un discours faisait que d'une façon de plus en plus répandue, qu'on sache, on sache ce que dit la fin du paragraphe de Freud, c'est à savoir que cet avenir tenu par le rêveur pour présent est gestaltet, structuré par l'indestructible demande en tant qu'elle est toujours la même : zum Ebenbild. C'est à savoir que, si vous voulez je vais vous mettre quelque chose ici : ----------------------------------------------------------------------->
qui serait ce voyage, à savoir ce développement, comme
ça qu'on fait de la naissance à la mort qui serait ce voyage,
à savoir ce développement, comme ça, ponctué,
de la naissance à la mort.
Et le "désir", comme on traduit improprement, est strictement,
durant toute la vie, toujours le même. Simplement des rapports d'un
être particulier dans son surgissement, dans son surgissement dans
un monde où déjà c'est ce discours qui règne,
il est parfaitement déterminé quant à son désir
du début jusqu'à la fin. Mais ça doit s'étendre, hein. En tout cas cette fonction
imaginaire essentiellement du viator doit nous mettre en garde
contre toute métaphore qui procède de la voie. Je sais bien qu'il y a cette sacrée question de la vérité,
hein. |
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