Il y a un petit livre, là, que... je vais commencer comme ça
sur le ton de la confidence, hein, parce que, évidemment je me
demande, je me demande en repartant, n'est-ce pas : suis-je assez dupe,
suis-je assez dupe, hein, pour ne pas errer ?
Errer au sens où je vous l'ai précisé la dernière
fois, ce qui veut dire : est-ce que je colle assez à... au discours
analytique, qui n'est quand même pas sans comporter une certaine
sorte d'horreur froide. Est-ce que je colle assez pour ne pas... pour
m'en distraire, c'est-à-dire ne pas le suivre vraiment selon son
fil ou même pour employer un terme, ouais dont je me servirai plus
tard, là où on m'attend, sur les espaces vectoriels, je
vous le dis tout de suite, enfin, j'aborderai pas ça aujourd'hui,
mais les espaces ça introduit une notion, comme ça, un autre
espace dans l'espace. On appelle ça "espace fibré".
Bon... Enfin, ce discours analytique, faut quand même pas oublier,
pour m'excuser si je n'y colle pas tout à fait, hein, c'est que
je l'ai fondé.
Je l'ai fondé d'une élaboration écrite, celle qui
s'écrit là, le petit a et le S2 superposés à
gauche, et puis le S barré et le S1 à droite.

Quand il s'agit d'être dupe, n'est-ce pas, il ne s'agit pas en
l'occasion d'être dupe de mes idées, parce que ces quatre
petites lettres, ça n'est pas des idées.
C'est pas même des idées du tout, la preuve c'est que...
c'est que, c'est, c'est que c'est très très très
difficile d'y donner un sens, et c'est même strictement fait pour
que ce soit impossible d'y donner un sens.
Ce qui ne veut pas dire que qu'on ne puisse pas en faire quelque chose.
C'est ce qui s'inscrit d'une certaine élaboration de ce que j'appellerai,
c'est la même chose de dire que ça s'inscrit que de dire
ce que je vais dire maintenant, à savoir la mathématique
de Freud.
Ce qui en est à proprement parler transmissible.
Ce qui est repérable à la logique de son discours. A son
errance à lui. C'est-à-dire à la façon dont
il essayait de rendre ce discours analytique adéquat au discours
scientifique. C'était ça son "erre". C'est ce qui l'a, je
ne peux pas dire "empêché", enfin n'est-ce pas, d'en faire
la mathématique ; puisque la mathématique, il la faisait
comme ça ! Fallait un deuxième pas pour ensuite pouvoir
l'inscrire.
Alors, pendant que je vous parlais la dernière fois, il m'est revenu,
comme ça, des bouffées de souvenirs, de quelque chose qui
bien sûr ne m'arrivait pas ici mais qui m'avait tracassé
le matin en préparant ce que j'avais à vous dire.
Voilà, ça s'appelle, tout de suite, disons-le, ça
s'appelle die Grenzen der Deutbarkeit. C'est quelque chose qui a un rapport
étroit, enfin, avec l'inscription du discours analytique, c'est
que si cette inscription est bien ce que j'en dis, à savoir le
début, le noyau clé de sa mathématique, il y a toutes
les chances à ce que ça serve à la même chose
que la mathématique. C'est-à-dire que ça porte en
soi sa propre limite. Je savais que j'avais lu ça, parce que je
l'avais dans un vieux machin que j'ai racheté comme ça,
d'occasion, dans les débris de ce qui surnageait des choses de
Freud, après l'histoire nazie, alors j'ai eu ce débris...
et je me disais que quand même ça avait dû être
recueilli quelque part, vu la date. C'est vrai. Ça a été
recueilli dans le tome III des Gesammelte Schrifte.
Mais pas ailleurs, à savoir là où ça aurait
dû paraître, étant déjà édité
en 1925, en fait, et même déjà paru, enfin, une première
fois si mon souvenir est bon dans... Eh ben non ! c'est pas paru
du tout avant . . . avant "ça", que j'ai eu, donc.
Alors c'était donc, c'est sorti dans les Gesammelte Schriften
mais ça n'a pas paru là où ça devait paraître
au moment où ça sortait, c'est à savoir dans la huitième
édition de la Traumdeutung. Et c'est pas paru parce que,
dans ces notes additionnelles en question, il y a un troisième
chapitre, le premier étant constitué par ces Grenzen
der Deutbarkeit, le second je vous le passe, je vous en reparlerai,
et le troisième signifie die occulte Bedeutung des Traumes.
C'est-à-dire "la signification occulte". C'est pour ça que
ce n'est pas paru.
Ce qui me restait dans l'esprit, ce qui me tracassait, c'étaient
die Grenzen. Mais à cause du fait que ces Grenzen étaient
associées à la signification occulte, que ce n'est pas sorti.
Jones raconte ça quelque part : l'occulte, enfin, il y a une objection.
Il y a une objection de la part du discours scientifique. Et en effet,
tel que ça se présente maintenant, l'occulte, ça
se définit très précisément en ceci, enfin
: ce que le discours scientifique ne peut pas encaisser. C'est même,
on peut le dire sa définition. Alors, c'est pas étonnant
qu'il y fasse objection. Cette objection est venue, comme ça, par
le véhicule de Jones, et ça peut paraître une explication
toute simple, du fait que ça ne soit pas paru là où
ça devait paraître, à savoir dans la huitième
édition.
Freud, vous le savez, c'était pas du tout neuf, enfin, qu'il se
tracassât sur l'occulte. Il le faisait, comme ça, par...
par "erre". Par erre concernant le discours scientifique. Oui, parce qu'il
s'imaginait que le discours scientifique, ça devait tenir compte
de tous les faits. C'était une pure erre. Et une erre plus grave
encore: une erre poussée jusqu'à
l'erreur. Ça ne tient compte, le discours scientifique, que des
faits qui ne collent pas avec sa structure, à savoir là
où il a commencé de s'avancer, son rapport avec sa propre
mathématique. Mais pour que ça ne colle pas, encore faut-il
que ça vienne à la portée de cette structure mathématique.
De sorte qu'il tient compte de tous les faits qui font trou dans son...
disons, enfin je vais vite, là, parce que c'est pas un mot qui
vaut ... mais qui font "trou" parce que c'est plus sensible tout de suite
de le dire comme ça, qui font "trou" dans son système !
Mais ce qui n'est pas de son système du tout, il ne veut rien en
savoir. Alors, en se tracassant, comme ça, sur les phénomènes
occultes, dits occultes, ça ne veut pas dire du tout qu'ils sont
occultes, qu'ils sont cachés, parce que, ce qui est caché,
c'est ce qui est caché par la forme du discours lui-même,
mais ce qui n'a absolument rien à faire avec la forme du discours,
c'est pas caché, c'est ailleurs.
Vous là, tels que vous êtes, comme ça je fais appel
à votre sentiment, enfin, il y a rien de commun entre l'inconscient
et l'occulte. En tout cas au niveau où vous êtes là
pour m'entendre, je pense que quand même vous êtes déjà,
enfin, assez rompus à cette idée que l'inconscient, ça
... [c'est fondamentalement] 1. du langage,
hein.
Et si vous avez pu l'autre jour regarder ce que j'avais commencé
de faire comme ça vaguement au tableau, avec la ligne dite du voyage,
et puis que vous avez pu simplement admettre ce que je vous serine depuis
vingt ans, enfin, même plus, à savoir ce qui clôt,
ce qui termine la Traumdeutung : ce que j'ai rappelé l'autre jour,
à savoir ce fameux désir indestructible qui se promène,
qui, sur la ligne du voyage, dès lors que l'entrée dans
le champ du langage s'est produite, accompagne d'un bout à l'autre
et Ebenbíld, toujours le même, sans variation, accompagne
le sujet structurant son désir.
Comme dit Freud, Ebenbild, à l'image, on traduit à
l'image, mais c'est pas à l'image, c'est Ebenbild, c'est
une image fixe, toujours la même ! à l'image der Vergangenheit,
c'est-à-dire ce qui, au regard de, de cet Ebenbild ne peut
même pas s'appeler du passé : c'est toujours la même
chose, il n'y a pas de passé à partir du moment où
il s'agit de cette fonction spatiale, le croisement de la ligne avec ce
réseau de la structure, qui se déplace, elle, selon la ligne,
mais en même temps dont on peut dire qu'elle ne se déplace
pas, puisque la ligne, elle ne varie pas.
C'est par rapport à la vie en tant
que voyage qu'on peut dire qu'il y en a une partie qui est passée
et puis une autre qui reste, comme ça, à consommer, qu'on
appelle l'avenir. Ces inscriptions du désir indestructible suivent
la glissade. Mais en suivant la glissade, du même coup elle l'arrête,
elle la fige, n'est-ce pas, parce que tout mouvement est relatif, n'est-ce
pas. Et si la glissade là-dedans n'est que glissade, elle ne constitue
pas un repère, hein. Voilà.
Alors la structure symbolique, n'est-ce pas, elle est à la fin
de cette Traumdeutung peut-être encore à découvrir,
mais c'est là-dessus que Freud conclut sa notion dans ce titre,
dans cette conclusion qui vient là comme la pointe même de
tout ce que jamais dans la Traumdeutung il a énoncé
du rêve : sa notion est là. C'est bien en ça que ce
qui en rétroagit, c'est que, c'est ce qu'il a expliqué à
propos du rêve, n'est-ce pas, c'est que : il y a de l'inconscient,
et que l'inconscient c'est ça, qu'il a pu dire à l'occasion
que l'inconscient est irrationnel mais que ça veut simplement dire
que sa rationalité est à construire, que même si le
principe de contradiction, le oui et le non, n'y jouent pas le rôle
qu'on croit dans la logique classique n'est-ce pas, comme la logique classique
est dépassée depuis longtemps, à ce moment-là,
ben, il faut en construire une autre... Ouais..
Et moi, je soupçonne que si die Grenzen der Deutbarkeit, les
limites de l'interprétation, c'est ça que ça veut
dire, ne sont pas sorties, sont pas sorties dans l'édition suivante
de l'Interprétation des rêves, c'est pas simplement parce
que c'était à l'ombre de l'occulte, c'est parce que quand
même, là, ça... ça en remettait.
Ça dépassait un peu le truc de l'affirmation que le désir
est indestructible, ça montrait dans cette structuration du désir
lui-même quelque chose qui justement aurait permis d'en mathématiser
autrement la nature. C'est pour ça que ça vaut la peine,
quand même que, que je vous en donne comme ça : il est évident
que devant une pareille assistance il n'est pas possible que je commente
vingt-cinq pages de Freud, il n'y en a pas plus, il y en a même
moins, mais je pourrai quand même aborder le premier paragraphe,
ça vous incitera à aller le trouver parce que quand même
ça a fini par être publié. L'étrange est que
ça n'ait été publié, comme me le fait remarquer
ma chère amie Nicole Sels, qui... qu'à la suite de la séance
dernière j'ai lancée sur ce truc, je lui ai dit : "Mais
enfin où diable c'est, cette histoire ? Cette histoire qui pourtant
dans les Gesammelte Schriften est indiquée tout de suite
après cette pointe sur laquelle j'ai terminé du désir
indestructible et invariant, car c'est de ça qu'il s'agit.
Dans les Gesammelte Schriften, il y a tout de suite après,
c'est même pas une note, après le point, le dernier point,
la dernière ligne, y a écrit ... Zusatz Kapitel,
ce qui veut dire appendice à peu près, comme on traduit
ça, c.
Et c'est pour le volume suivant, le volume 3, auquel bien naturellement
on se reporte, mais il était indiqué qu'il fallait, enfin
que c'était normal de le coller là, ce qu'on n'a pas fait
sous le prétexte que je vous ai dit tout à l'heure, dans
la huitième édition, précisément.(1bis
. )
Alors, comme me le commente, ça vaut la
peine, n'est-ce pas, comme me le commente la chère Nicole, qui
en connaît un bout pour ce qui est de chercher l'édition
d'un texte, qui en connaît un bout et qui en fout un coup, enfin,
c'est inimaginable ce que je la fais cavaler, je veux dire que, elle cavale,
n'est-ce pas et qu'elle me rapporte le truc dans les deux heures : là
elle a mis beaucoup plus de temps, elle a mis au moins trois jours.
Oui, il ne figure ce chapitre supplémentaire, parce que je lui
avais dit : "Quand même ce serait curieux que je le trouve pas dans
les Gesammelte Werke. Et je le trouve pas !"
Elle me répond qu'il n'est dans cet ouvrage à aucune place
logique, ni au tome qui correspond de la Traumdeutung, ça
bien sûr je m'en étais aperçu, c'est même ce
qui m'avait rendu enragé, ni dans le tome XIV qui correspond à
l'année 1925. Il a paru in extremis et, ajoute-t-elle, sournoisement
dans le tome I, car ce tome a été le dernier à paraître,
en 1952.
Et là elle me rapporte bien sûr l'opinion de Strachey, qui
lui-même l'a traduit dans la Standard Édition, n'est-ce
pas, mais au tome XIX, mais c'est-à-dire à son année
normale, oui, c'est vrai, mais il pense que ce sort est dû aux mines
que tout le monde a fait devant l'occulte Bedeutung des rêves.
C'est ce que pense Strachey. Je ne sais pas ce qu'en pense Nicole Sels,
mais c'est, au regard des, simplement les faits qu'elle m'apporte, secondaire.
Alors, je ne vous lis pas tout de suite la chose en allemand.
Ça se dit comme ça : la question
si on peut donner de tout produit de la vie de rêve une complète
et assurée traduction, vollständige und gesicherte
Ubersetzung, déjà cet emploi de Ubersetzung,
c'est pas mal, c'est très lacanien, bon, in die Ausdrücksweise
des Wachslebens, dans le mode de s'exprimer de la vie de veille,
et il met là entre parenthèses (Deutung) c'est-à-dire
sens, Deutbarkeit ça veut dire interprétation mais
Deutung, ça veut dire sens, Traumdeutung, ça
veut dire sens des rêves, ne peut pas être traitée
abstraitement.
Mais sous la Beziehung, relation avec Verhältnisse,
c'est un autre terme pour exprimer relations, avec les relations,
donc désignées par un autre mot, c'est-à-dire posées
autrement : Beziehung, c'est quelque chose comme ça d'approximatif.
Verhältnisse, ça peut être pris dans le sens
des relations qui s'écrivent, je veux dire de ce qui est constitué
à proprement parler dans une articulation propre au sens du terme,
n'est-ce pas, comme quelque chose qui peut arriver à se poser là
les relations, sous... unter denen, sous le coup desquelles
on travaille à l'interprétation des rêves, man
an der Traumdeutung arbeitet.
Et c'est là que... on entre un peu plus avant
: Nos activités geistigen, celles de l'esprit, c'est comme
ça : unsere geistigen Tätigkeiten.
Pour Freud, ça veut dire ce qu'on pense.
Les activités de l'esprit, c'est ce qui est généralement
désigné comme les pensées.
Streben. Streben, c'est un mot qui a tout
autre résonance, n'est-ce pas, que ce par quoi on le traduit en
anglais, à savoir, dans cette occasion, n'est-ce pas, c'est la
traduction de Strachey justement, pursue. Ça ne poursuit
rien du tout. Ça poursuit rien du tout, streben, quand on
regarde bien ce que c'est, quand on voit l'étoffe du mot, ce qui
évidemment se fait avec ses usages précédents,
c'est quelque chose qui est à inscrire, quelque chose comme ça
: vous comprenez si vous avez une voûte, comme ça,
quelque chose en bois, c'est les tirants. Ça a l'air de la supporter
comme ça. Si vous aviez la moindre notion d'architecture, vous
sauriez que les tirants, dans une voûte, eh bien, ça tire.
Je veux dire que ça tire vers l'extérieur. Les tirants,
ça ne soutient pas.
Bon, enfin, qu'importe, sur le streben, sur le streben, ce
qu'ils tirent, ce qu'ils font tenir ensemble, c'est ou bien ein
nützliches Ziel et là vous retrouvez les fonctions
essentiellement lacaniennes de l'utile et du jouir, elles sont précisées
comme telles, c'est là-dessus qu'au départ j'ai fait entièrement
pivoter tout ce que j'ai dit de l'éthique de la psychanalyse, un
but utile, c'est ou ça, qu'elles anstreben,
qu'elles attirent, ou bien : oder unmittelbaren Lustgewinn, à
savoir, à savoir tout simplement mon plus-de-jouir.(2).
Car qu'est-ce que ça veut dire un Lustgewinn ? Un gain de
Lust. Si là, l'ambiguïté de ce terme Lust
en allemand, n'est-ce pas, ne permet pas d'introduire dans le Lustprinzip,
traduit "principe du plaisir", justement cette formidable divergence qu'il
y a entre la notion du plaisir telle qu'elle est commentée par
Freud lui-même selon la traduction antique, seule issue de la sagesse
épicurienne, ce qui voulait dire jouir le moins possible, parce
que qu'est-ce que ça nous emmerde, la jouissance ! C'est justement
pour ça qu'ils se faisaient traiter de pourceaux, parce qu'en effet,
les pourceaux, mon Dieu, ça jouit pas tellement qu'on s'imagine,
n'est-ce pas, ça reste dans sa petite porcherie, bien tranquilles,
enfin, ça jouit au minimum...
C'est bien pour ça qu'on les a traités de pourceaux,
parce que tous les autres, enfin, ils étaient vachement tracassés
par la jouissance. Fallait, enfin, qu'ils en mettent un coup, enfin
: ils étaient esclaves de la jouissance. C'est même pour
ça, tiens... là je me laisse emporter, hein, c'est même
pour ça qu'il y avait des esclaves, hein.
La seule civilisation qui était vraiment mordue par la jouissance,
il fallait qu'elle ait des esclaves. Parce que ceux qui jouissaient,
c'étaient eux. Sans les esclaves, pas de jouissance hein. Vous,
vous êtes tous des employés. Enfin, vous faites ce que
vous pouvez pour être des employés. Vous n'êtes pas
encore tout à fait arrivés, mais croyez-moi, vous y viendrez.
Bon, je me suis un peu laissé emballer, là comme ça.
Réfléchissez quand même un peu à ça,
enfin, n'est-ce pas, qu'il y a que les esclaves qui jouissent. C'est
leur fonction. Et c'est pour ça qu'on les isole, que même
on n'a pas le moindre scrupule à transformer des hommes libres
en esclaves, puisqu'en les faisant esclaves, on leur permet de ne plus
se consacrer qu'à jouir. Les hommes libres, ils n'aspirent qu'à
ça. Et comme ils sont altruistes, enfin, ils font des esclaves.
Enfin, c'est arrivé comme ça dans l'histoire, dans notre
histoire à nous. Évidemment, il y avait des endroits où
on était beaucoup plus civilisés, il n'y avait pas d'esclavage
en Chine. Mais le résultat c'est que, malgré tout ce qu'on
dit, ils ne sont pas arrivés à faire la science, hein.
Maintenant, ils ont été touchés par un petit peu
de Marx, alors ils se réveillent. Comme disait Napoléon
: les réveillez pas, surtout ! Maintenant, ils sont réveillés.
Ils n'auront pas eu besoin de passer par le truc des esclaves. Ce qui
prouve quand même qu'il y a des greffes, enfin n'est-ce pas, que
c'est pas le pire qu'on peut éviter. On peut éviter le
meilleur. Et arriver quand même.
Bon, enfin, unmittelbaren Lustgewinn, ça
veut dire un plus-de-jouir, là, immédiat. Dans le premier
cas, hein, celui du but d'utilité, ce sont... ces geistigen
Tätigkeiten, ces opérations spirituelles, ce sont des
décisions intellectuelles, des préparations à la
manipulation, hein, Handlungen, ou des communications an Andere
aux autres, à savoir que l'on parle pour les, comme je viens
de dire, pour les manipuler, comme vous dites.
Dans l'autre cas, nous appelons ça,
nennen wir sie sie, c'est à savoir les gestigen Tätigkeiten
Spielen und Phantasieren, nous appelons ça des jeux et le fait
de fantasmer. Bien sûr, qu'il dit, bekanntlich, n'est-ce
pas, l'utile, c'est simplement aussi quand même un détour,
ein Umveg, pour une satisfaction de jouissance.
Mais c'est pas en soi qu'elle est visée, n'est-ce pas.
Le rêver - il n'a pas dit le rêve - le fait de
rêver est donc une activité de la seconde espèce,
à savoir ce qu'il a défini par le unmittelbaren Lustgewinn.
Il est une erreur, irrefürhend, de dire que le
rêver s'efforce à ces, ces devoirs pressants toujours imminents
de la vie commune, et cherche à mener à bonne fin, à
mener à bonne fin quoi ? le travail du jour, Tagesarbeit.
De ça se soucie le penser préconscient : das vorbewusste
Denken.
Pour le rêve, cette utilisation, cette intention utile,
n'est-ce pas, est tout à fait aussi étrangère
que la mise en jeu, en oeuvre, la préparation, le fignolage,
n'est-ce pas, d'une communication, einer Mitteilung, à
un autre, an einen Anderen. En quoi il a ceci de lacanien,
notre cher Freud, n'est-ce pas, que, puisque tout ce qu'il vient de
nous dire autour du rêve, c'est uniquement de la construction,
du chiffrage, ce chiffrage qui est la dimension du langage n'a rien
à faire avec la communication.
Le rapport de l'homme au langage, lequel ne peut se... simplement,
s'attaquer que sur la base de ceci : que le signifiant c'est un signe,
qui ne s'adresse qu'à un autre signe ; que le signifiant, c'est
ce qui fait signe à un signe, et que c'est pour ça que
c'est le signifiant. Ça n'a rien à faire avec la communication
à quelqu'un d'autre, ça détermine un sujet, ça
a pour effet un sujet. Et le sujet, c'est bien assez qu'il soit déterminé
par ça, en tant que sujet, à savoir qu'il surgisse de
quelque chose qui ne peut avoir sa justification qu'ailleurs. A ceci
près que dans le rêve, on la voit, à savoir que
l'opération du chiffrage, c'est fait pour la jouissance.
A savoir que les choses sont faites pour que dans le chiffrage on y
gagne ce quelque chose qui est l'essentiel du processus primaire, à
savoir un Lustgewinn.
C'est ça qui est dit là.
Et puis ça continue. Et non seulement ça continue, mais
ça appuie. Et ça montre bien en quoi, pour quoi le rêve
fonctionne, c'est à savoir qu'il n'est fait et n'est fait en
rien, et c'est pour ça qu'il fonctionne comme ça, il n'est
fait en rien que pour le sommeil, den Schlaf verhütten, protéger.
Il protège le sommeil. Ce que Freud n'a dit, comme ça,
qu'incidemment dans divers points, là il insiste. Je veux dire
que la question qu'il introduit, c'est en quoi précisément
ce qui du rêve dépend de l'inconscient, c'est-à-dire
de la structure, de la structure du désir, ce qui du rêve
pourrait bien incommoder le sommeil.
Sur le sommeil, il est clair que nous ne savons pas grand-chose. Nous
ne savons pas grand-chose justement parce que, parce que ceux qui les
étudient, comme ça, comme faits, avec deux petits encéphalographes,
encéphalopodes, encéphalo-tout-ce-que-vous-voudrez, ben,
ils lient des choses ensemble, enfin mais... c'est quand même
curieux, n'est-ce pas, qu'une chose aussi répandue dans la vie,
là, comme on dit, que le sommeil, enfin je n'avance rien, là,
je, je, je constate que... on n'a jamais posé la question de
ce que ça avait à faire avec la jouissance. Tout ça
parce que la jouissance, enfin c'est, faut bien dire qu'on n'en a pas
fait un ressort tout à fait majeur de la conception du monde,
comme on s'exprime.
Qu'est-ce que c'est que le sommeil ? C'est peut-être là
que la formule de Freud pourrait évidemment prendre son sens
et rejoindre l'idée du plaisir : si j'ai parlé des pourceaux
tout à l'heure, c'est parce qu'ils roupillent souvent, oui. Ils
ont le moins de jouissance possible dans la mesure où plus ça
dort, mieux ça vaut. En tout cas ça collerait avec...
si mon hypothèse est bonne à savoir que c'est dans le
chiffrage qu'est la jouissance, on peut voir aussi, on peut voir aussi
par là, enfin, quelque chose, c'est que en effet le chiffrage
du rêve, après tout, il est pas poussé si loin que
ça, si loin qu'on le dit, enfin, c'est, c'est... j'ai déjà
expliqué la condensation, le déplacement, enfin c'est...
c'est la métaphore, c'est la métonymie, et puis c'est
toute sorte de petites manipulations comme ça qui étendent
la chose dans l'Imaginaire.
C'est dans cette direction-là, hein, qu'il faut voir la jouissance.
Alors on pourrait peut-être s'élever, n'est-ce pas, à
une structure, comme ça conforme, conforme à l'histoire
du chiffrage, c'est que si c'est dans le sens de ce quelque chose qui
arrive... à quoi ? die Grenzen, les limites. Là
est l'erreur. Les limites der Deutbarkeit, si vous lisez bien
ces quatre pages, car il n'y en a pas plus, vous vous apercevrez que,
ce qui la signale cette limite, c'est exactement le même moment
quand ça arrive au sens. A savoir que le sens il est en somme
assez court. C'est pas trente-six sens qu'on découvre au bi-du-bout
de l'inconscient : c'est le sens sexuel. C'est-à-dire très
précisément le "sens non-sens". Le sens où ça
foire la Verhältnis. La Beziehung, elle a lieu avec
ceci : qu'il n'y a pas de sexuelles Verhältnisse, que ça
: la Verhälltnis en tant qu'écrite, en tant que ça
peut s'inscrire ou que c'est mathème, ça, ça foire
toujours. Et c'est bien pour ça que, il y a un moment où
le rêve, ça se dégonfle, c'est-à-dire qu'on
cesse de rêver et que le sommeil, il reste à l'abri de
la jouissance. C'est parce qu'en fin de compte on en voit le bout.
Mais l'important, l'important pour nous, s'il est vrai que ce sens
sexuel, il ne se définit que de ne pas pouvoir s'écrire,
c'est de voir justement ce qui, dans le chiffrage, non pas dans le déchiffrage,
ce qui dans le chiffrage nécessite die Grenzen, le même
mot, ici employé dans le titre, le même mot sert à
ce qui, dans la mathématique, se désigne comme limite.
Comme limite d'une fonction ou comme limite d'un nombre réel.
Ça peut augmenter tant que ça veut, la variable, la fonction
ne dépassera pas d'une certaine limite.
Et le langage, c'est fait comme ça. C'est quelque chose qui,
aussi loin que vous en poussiez le chiffrage, n'arrivera jamais à
lâcher ce qu'il en est du sens, parce qu'il est là à
la place du sens, parce qu'il est là à cette place.
Et ce qui fait que le rapport sexuel ne peut pas s'écrire, c'est
justement ce trou-là, que bouche tout le langage en tant que
tel, l'accès, l'accès de l'être parlant à
quelque chose qui se présente bien, comme en certain point touchant
au Réel, là, dans ce point-là, dans ce point-là
se justifie que le Réel je le définisse de l'impossible,
parce que là, justement, il n'arrive pas, jamais, c'est la nature
du langage, il n'arrive pas, jamais à ce que le rapport sexuel
puisse s'inscrire. Ouais... Ouais...
Alors il reste nos histoires de Freud avec son occulte.
L'histoire d'occulte, c'est très curieux, n'est-ce pas. Je vous
ai parlé de la huitième édition, mais pas de la
septième. La septième, c'est impossible de mettre la main
dessus, non pas à cause des nazis cette fois, mais parce qu'elle
est parue probablement en très peu d'exemplaires, enfin c'est
sorti en 1919, vous vous rendez compte !
La chose fabuleuse, c'est que quand même, grâce à
une autre amie, vous voyez, je n'ai que des amies... rires ! Nany Bridgman,
Nany Bridgman qui est à la B.N. a mis la main sur la septième.
Eh bien, ça m'a soulagé, hein.
Parce que de la façon dont Freud est traduit, il est vrai que
ça a surtout commencé avec Marie Bonaparte, bon... mais
avant, il y avait eu Isaac Meyerson. J'avais été, je lui
en demande pardon, jusqu'à penser que pour lui, c'était
le même truc, à savoir qu'il écrivait n'importe
quoi, j'avais été jusque là, et pourquoi ?
Parce que, je ne l'ai pas apporté là, comme ça,
c'est malheureux mais je l'ai oublié, voilà la vérité,
il y a une petite phrase, il y a une petite phrase, il y a une petite
phrase au moment où, où Freud pose la question, c'est
ça qui culmine dans ce dernier paragraphe dont je vous ai parlé,
au moment où Freud pose la question de ce qu'il en est de cet...
quel est l'ordre de réalité de ce rêve, il est forcé
d'appeler ça psychique, mais en même temps ça le
tracasse de l'appeler psychique, parce qu'il sent bien que l'âme,
enfin, ça colle pas à c'te histoire, enfin que l'âme
c'est quand même pas différent du corps, bon.
Alors là, il évoque la réalité matérielle,
il n'a pas vu très bien qu'à ce moment-là, que
le matériel, il l'avait là, c'était tout son bouquin,
tout simplement à savoir la façon dont il avait traité
le rêve, en le traitant par la manipulation du déchiffrage,
c'est-à-dire après tout avec simplement ce que le langage
comporte de ditmansion, de chiffré.
Alors là, il s'engage dans ce qu'il en est en fin de compte de
cette réalité, et il est saisi, il est saisi uniquement
là, c'est la seule édition où il y a une phrase
comme ça, une phrase où tout d'un coup, il répudie
ce fait : un savant, un savant certes modeste, il le qualifie comme
ça, il y a quand même deux trucs que de toute façon,
enfin il met là une barrière, il ne peut pas encaisser,
c'est la subsistance de ce qui est mort.
Ça, ça vise l'immortalité de l'âme.
Et deuxièmement, le fait que tous les éléments
de l'avenir soient calculables. Ce qui est évidemment là
rejoindre enfin n'est-ce pas le sol solide d'Aristote, hein.
L'âme dans Aristote est définie de telle sorte qu'elle
n'implique nullement son immortalité et c'est d'ailleurs grâce
à ça qu'il peut y avoir un progrès de la science,
c'est à partir du moment où en effet on s'intéresse
au corps, et puis deuxièmement, deuxièmement ceci : c'est
le maintien du contingent comme essentiel. Et après tout pourquoi
le contingent, à savoir ce qui va se passer demain, nous ne pouvons
pas le prédire. En beaucoup de choses nous pouvons le prédire.
De quoi se sert Aristote dans sa définition du contingent ? De
savoir qu'est-ce qui va demain avoir la victoire, de savoir si dès
aujourd'hui, au nom de ceci que demain une chose s'appellera "victoire
de Mantinée", est-ce que nous pouvons écrire dès
aujourd'hui "victoire de Mantinée". C'est uniquement de ça
qu'il s'agit dans l'argumentation d'Aristote à propos du contingent.
C'est tout de même une belle occasion de nous interroger sur ce
pour quoi des événements qui ne sont pas d'ailleurs n'importe
lesquels, qui sont des événements, disons humains, je
ne vois pas pourquoi je répugnerais là à l'énoncer
ainsi...
Pourquoi est-ce que c'est ça le contingent ? Parce qu'après
tout, il y a quand même des événements humains qui
sont d'autant plus prévisibles qu'ils sont constants. Par exemple
j'étais sûr que vous seriez aussi nombreux aujourd'hui
que la dernière fois, pour des raisons d'ailleurs aussi obscures,
mais enfin c'était calculable. Pourquoi est-ce qu'une victoire
n'est pas calculable ?
Qui est-ce qui me répond ?...
(A Gloria Gonzalès, sa secrétaire) : Donnez-moi un cigare.
Écoutez : une victoire n'est pas calculable...
Quelqu'un dans la salle : - Parce qu'il faut être deux...
trois...
J.L - Il y a, ya d'l'idée, y a de l'idée... Il y a
de l'idée, c'est évident, enfin, c'est vrai comme vous dites
il faut être deux, et même parfois un peu plus... Mais en
allant dans ce sens-là, n'est-ce pas, vous voyez bien que, malgré
tout, vous glissez tout doucement du côté, du côté
où ce deux, où ce deux foire, à savoir du côté
du rapport sexuel.
C'est tout un truc, hein, d'être deux. Oui. Quand je pense que je
n'aurai pas le temps aujourd'hui de vous raconter toutes les belles choses
que j'avais préparées pour vous sur l'amour, eh ben, ça
me déçoit un peu mais c'est parce que j'ai traîné
et puis j'ai traîné comme ça parce que... parce que
j'ai voulu faire quand même un chiffrage soigné, c'est-à-dire
ne pas trop errer, hein, alors pour le reste, enfin, vous pourrez peut-être
un peu, un peu attendre.
Mais pour me référer à quelque chose que j'ai déjà
avancé, je l'ai dit de mille façons bien souvent, mais un
jour je l'ai dit tout à fait cru, comme ça en clair, j'ai
dit que l'effet de l'interprétation pour me limiter à ce
à quoi, n'est-ce pas, je dois rester collé, je dois rester
dupe et plus encore dupe sans me forcer, parce que si je suis dupe en
me forçant, eh bien j'écrirai le Discours sur les passions
de l'amour justement, c'est-à-dire ce qu'a écrit Pascal,
et qu'est-ce qu'on voit qu'il se force, hein ? Après ça,
naturellement ça a lâché, ça a claqué,
il n'a jamais pu y revenir, mais enfin, il est assez probable, j'en suis
pas sûr, qu'il s'est forcé, quand il a écrit ça,
quand même. Ca donne des résultats absolument stupéfiants,
enfin n'est-ce pas. C'est absolument magnifique, enfin : en se forçant,
on arrive à dire... on arrive, on arrive vraiment à ne pas
errer. Lisez-ça, enfin ça colle, l'amour ça se passe
comme ça. Absolument déconcertant, mais ça se passe
comme ça. Bon.
Qu'est-ce que ça veut dire que l'interprétation est incalculable
dans ses effets ?
Ca veut dire que son seul sens, c'est la jouissance.
C'est la jouissance d'ailleurs qui fait tout à fait obstacle à
ce que le rapport sexuel ne puisse d'aucune façon s'inscrire, et
qu'en somme ça permet d'étendre à la jouissance cette
formule que l'effet de l'interprétation est incalculable. Et si
vous réfléchissez bien, en effet, à ce qui se passe
à la rencontre de ces deux troupeaux qu'on appelle armées,
n'est-ce pas et qui d'ailleurs sont des discours, des discours ambulants,
enfin je veux dire que chacun ne tient que parce qu'on croit que le capitaine,
c'est S1. Bon...
Il est tout de même tout à fait clair que si la victoire
d'une armée sur une autre est strictement imprévisible,
c'est que du combattant, on ne peut pas calculer la jouissance.
Que tout est là, enfin s'il y en a qui jouissent de se faire tuer,
ils ont l'avantage.
Voilà ! C'était un petit aperçu concernant ce qu'il
peut en être du contingent, c'est-à-dire de ce qui ne se
définit que de l'incalculable... Ouais.
Alors maintenant, quand même, je ne vais tout de même pas
vous quitter sans vous dire quelques petits mots de ce qu'il en est tout
à l'opposé de la ligne, comme ça, où nous
nous sommes, enfin exercés, ou bien je me suis exercé devant
vous, mais où quand même, vous avez quand même... enfin
il y a des chances, comme ça un peu suivi, au moins suivi par votre
silence, n'est-ce pas...
L'occulte, ça peut quand même pas seulement se définir
par le fait enfin que c'est rejeté par la science. Parce que, comme
je viens de vous dire, c'est fou tout ce que ça rejette, la science,
hein !
En principe tout ce que nous venons de dire et qui existe pourtant, quand
même, à savoir la guerre.
Ils sont là, tous, les savants, à se creuser la tête
: Warum Krieg ? Ah ! ah ! Pourquoi la guerre ? Ils
n'arrivent pas à comprendre ça, les pauvres... ouais ...
Ils se mettent à deux pour ça, hein, Freud et Einstein.
C'est pas en leur faveur...
Mais enfin l'occulte, l'occulte c'est bel et bien sûrement ça
: cette absence du rapport. Et je vous en dirais bien même un petit
peu plus, enfin, s'il fallait pas tout de même que je précise
bien comment ça se présentait du temps de Freud. Parce que
là c'est tout à fait clair. Tout ce qu'il a écrit
n'est-ce pas, Psychoanalyse und Telepathie, Traum and Telepathie,
dont ont fait Dieu sait quel mauvais usage les gens qui ont isolé
ça sous le nom de phénomène psi, c'est des
escrocs, n'est-ce pas.
Il faut quand même bien voir que Freud, alors lisez ses textes n'est-ce
pas, ceux dont je viens de donner le titre, parce que quand même,
ceux-là, on les trouve, contrairement aux Grenzen der Deutbarkeit.
C'est tout à fait clair : il dit que le rêve et la télépathie,
par exemple, ça n'a strictement rien à faire. C'est même
au point qu'il va jusqu'à dire : mais la télépathie,
n'est-ce pas, c'est quelque chose du même ordre, enfin, je l'admets,
pourquoi pas, c'est de l'ordre de la communication. Et dans le rêve,
c'est traité comme n'importe quelle autre, à savoir la première
partie de ce que je vous avais énoncé tout à l'heure,
à savoir etwass nützliches n'est-ce pas, quelque chose
qui sert aux manigances de la journée, et c'est repris de la même
façon dans le rêve.
Non seulement il préfère admettre, mais très précisément
il démontre que dans tous les cas où il y a eu télépathie
soi-disant "rêvée", ce sont des cas où on peut admettre
le fait direct qu'il y a eu message, à savoir annonce par fil spécial
si je puis m'exprimer ainsi car c'est ça la télépathie,
n'est-ce pas, c'est le fil spécial !
On peut, il n'y a qu'à traiter le cas, il n'y a qu'à l'envisager,
y a qu'à opérer avec lui, en pensant que, comme n'importe
quel autre résidu du jour, il y a eu avertissement télépathique.
Que ce soit télépathique ou pas, autrement dit, il s'en
fout, la seule chose qui l'intéresse c'est que c'est repris dans
le rêve, ceci, je ne peux pas vous faire la lecture parce qu'il
est trop tard n'est-ce pas, ceci est énoncé dans Freud :
il faut considérer pour concevoir quelque chose aux rapports de
la télépathie et du rêve que la télépathie
s'est produite comme un reste, résidu de la journée précédente.
Il préfère admettre ça, quoique bien sûr, naturellement...
il préfère admettre le phénomène télépathique,
c'est ça le sens de sa position, que de le faire rentrer dans le
rêve.
Et il souligne, il souligne, à savoir il dit pourquoi, parce que
le rêve c'est fait avec... et il fait toute la liste, toute une
série de chiffrages et que ces chiffrages ne peuvent porter que
sur un matériel qui est constitué par les restes diurnes.
Il préfère mettre la télépathie, la ranger
dans les événements courants à ceci : de la rattacher
en rien aux mécanismes eux-mêmes de l'inconscient.
C'est si facile à confirmer, il suffit que vous vous rapportiez,
bien sûr naturellement en français tout ça n'a jamais
été traduit mais quand même, il y en a certains d'entre
vous qui lisent l'anglais, même j'espère beaucoup, et d'autre
part un certain nombre qui lisent l'allemand, reportez-vous aux textes
de Freud sur l'inconscient et la télépathie. Il n'y a jamais
d'ambiguïté, il préfère tout, à savoir
en somme non seulement ce qu'il met en doute, mais ce sur quoi ce dont
il se lave les mains, ce dont il dit : je n'ai là-dessus aucune
compétence. Mais il préfère admettre que la télépathie
existe à simplement la rapprocher de ce qu'il en est de l'inconscient.
Autrement dit, tout ce qu'il émet, tout ce qu'il avance comme remarquable,
considérant certains rêves, tout ce qu'il avance comme remarquable
consiste toujours à dire : il n'y a rien eu d'autre que de rapport
au rêve en tant que chiffrage.
Ou encore que de rapport de l'inconscient de l'occultiste ou du diseur
de bonne fortune avec l'inconscient du sujet. En d'autres termes, il dénie
tout phénomène télépathique auprès
de ceci, il dénie au regard de ceci, qu'il n'y a eu que repérage
du désir.
Ce repérage du désir, il le considère comme toujours
possible, ce qui veut dire, ce qui veut dire par rapport à mon
inscription de l'autre jour de la vie comme voyage et de la structure
qui se déplace en même temps que le voyage dessiné,
dessiné linéairement.
La question peut se poser et comment ne se poserait-elle pas si vraiment
la structure est ponctuée par le désir de l'Autre, en tant
que tel, si déjà le sujet naît inclus dans le langage,
inclus dans le langage et déjà déterminé dans
son inconscient par le désir de l'Autre, pourquoi n'y aurait-il
pas entre tout ça une certaine solidarité ?
L'inconscient n'exclut pas, si l'inconscient est cette structure, cette
structure de langage, l'inconscient n'exclut pas et ce n'est que trop
évident, l'inconscient n'exclut pas la reconnaissance du désir
de l'Autre comme tel, en d'autres termes le réseau, le réseau
de structure dont le sujet est un déterminé particulier,
il est concevable qu'il communique avec les autres structures, les structures
des parents certainement, et pourquoi pas à l'occasion avec ces
structures qui sont celles d'un inconnu, pour peu, pour peu, souligne
Freud, que son attention soit, soit comme ça, un peu ailleurs.
Et le plus fort, ce qu'il souligne, n'est-ce pas, c'est que ce détournement
de l'attention, il est justement obtenu par, par la façon dont
le diseur de bonne fortune se tracasse lui-même avec toutes sortes
d'objets mythiques, ça détourne assez son attention pour
qu'il puisse enfin appréhender quelque chose qui lui permette de
faire la prédiction suivante à une certaine jeune femme
qui a enlevé sa bague de mariage pour lui faire croire que... enfin
pour rester anonyme, il lui dit qu'elle va se marier et qu'elle aura deux
enfants à trente-deux ans.
Il n'y a d'explications à cette prédiction qui d'ailleurs
ne se réalise absolument pas mais qui malgré qu'elle ne
se soit pas réalisée laisse le sujet qui en a été
le destinataire absolument dans l'enchantement.
Chaque fois que Freud souligne un fait de télépathie, c'est
toujours un fait de cet ordre, à savoir où la prédiction
ne s'est nullement réalisée, ne s'est nullement réalisée
mais qui par contre laisse le sujet dans un état de satisfaction
absolument épanouie. On ne pouvait rien lui dire de mieux. Et en
effet, ce chiffre trente-deux dans l'occasion était inscrit dans
son désir.
Si l'inconscient est ce que Freud nous dit, si des chiffres choisis au
hasard, n'est-ce pas, ne sont en réalité jamais choisis
au hasard, c'est précisément par leur certain rapport avec
le désir du sujet, c'est ce qu'étale tout au long la Psychopathologie
de la vie quotidienne.
L'intérêt, l'intérêt est ceci que Freud sait
très bien souligner éventuellement, n'est-ce pas, c'est
que... le seul point remarquable de ces faits dits d'occultisme, c'est
qu'ils concernent toujours une personne à qui on tient, pour qui
on a de l'intérêt. Que l'on aime.
Mais il est tout ce qu'il y a de plus concevable que d'une personne que
l'on aime, on ait avec elle quelques rapports inconscients. Mais ça
n'est pas, ça n'est pas en tant qu'on l'aime, parce qu'en tant
qu'on l'aime, c'est bien connu, n'est-ce pas, on la rate, on n'y arrive
pas.
Alors il s'agit tout de même de deux choses, dans ces prétendues
informations télépathiques.
Il y a le contenu de l'information. Et puis il y a le fait de l'information.
Le fait de l'information, c'est à très proprement parler
ce que Freud repousse. Il veut bien l'admettre comme possible, mais dans
un monde avec quoi il n'a strictement rien à faire.
Pour le contenu de l'information, il n'a rien à faire avec la personne,
avec la personne dont il s'agirait d'avoir une information. Il a affaire
uniquement avec le désir du sujet, en tant que l'amour, ça
ne comporte que trop cette part de désir, ça désirerait
être possible.
Alors, ce que je veux simplement, en vous quittant, accentuer : c'est
qu'il y a quand même quelque chose qui se véhicule depuis
le fin fond des temps et qui s'appelle l'initiation.
L'initiation, c'est ce dont nous avons des débris au titre
de l'occultisme. Ça prouve simplement que c'est la seule chose
qui, en fin de compte, nous intéresse encore dans l'initiation.
Je ne vois pas pourquoi je ne donnerais pas à l'initiation que
l'Antiquité connaissait, enfin, un certain statut.
Tout ce que nous pouvons entrevoir des fameux Mystères et tout
ce qui peut nous en rester encore dans des pays ethnologiquement situables,
de quelque chose de l'ordre de l'initiation, c'est lié, c'est
lié à ce que quelque part, quelqu'un comme Mauss n'est-ce
pas, avait appelé "technique du corps", je veux dire que, ce
que nous avons et qui nous concerne dans ce discours autant analytique
que scientifique, voire universitaire, voire celui du Maître et
tout ce que vous voudrez, c'est que, elle se présente elle-même,
l'initiation, quand on regarde la chose de près, toujours comme
ceci : une approche, une approche qui ne se fait pas sans toutes sortes
de détours, de lenteurs, une approche de quelque chose où
ce qui est ouvert, révélé, c'est quelque chose
qui strictement concerne la jouissance. Je veux dire qu'il n'est pas
impensable que le corps, le corps en tant que nous le croyons vivant,
soit quelque chose de beaucoup plus calé que ce que connaissent
les anatomo-physiologistes. Il y a peut-être une science de la
jouissance, si on peut s'exprimer ainsi. L'initiation en aucun cas ne
peut se définir autrement. Il n'y a qu'un malheur, c'est que
de nos jours, il n'y a plus trace, absolument nulle part, d'initiation.
Voilà.
|