École Lacanienne de Psychanalyse


« Je l'ai tué, dit-elle, c'est mon père »

Diego Nin, Raquel Capurro
EPEL 2005 / ISBN n°2-908855-80- / 352 p. / 39 €.
Envoi de Christine Angot
Traduit de l'espagnol (Uruguay) par Françoise Ben Kemoun
12 Illustrations.

Montevideo (Uruguay), été 1935. Un fait divers secoue la ville : Iris Cabezudo, une jeune et brillante étudiante, vient de tuer son père d'un coup de revolver. Déclarations devant le juge, articles de presse, jugements, expertises médicales, version écrite par la mère, archives, témoignages, récits d'Iris elle-même dont la qualité littéraire a aussitôt été reconnue composent ici un ensemble rare par son étendue et sa diversité.
Presse et justice accueillent d'emblée la version maternelle des événements que la jeune fille reproduit comme en écho : le père tyran menaçant et violent, la mère victime de cette violence dont les enfants étaient témoins. Expertises psychiatriques à l'appui, le juge conclut à un non-lieu : Iris aurait tué sous la menace de la folie meurtrière de son père, pour y mettre fin. Libérée après une année de prison, elle retourne dans sa famille et achève ses études d'institutrice.
Elle découvre alors, surprise, que son acte n'a pas eu les effets escomptés. Loin d'avoir mis un terme à l'enfer familial, il l'a renforcé. La mère continue à multiplier des reproches sans fin à l'encontre du mort. Scrutant sa conduite Iris conclut que c’était elle, cette mère si idéale et idéaliste, la véritable cause des malheurs familiaux.
Qu’est donc la persécution pour pouvoir si radicalement basculer d’une adhésion sans partage à un refus forcené ?
Décembre 1956 : Iris demande qu'on examine sa mère. Elle la tient pour folle. Réaction immédiate du psychiatre : diagnostiquée et hospitalisée comme paranoïaque, Iris se trouve plus démunie face à l'ordre médical qu'après son crime. Elle s'en explique par écrit.
Elle sera alors autorisée à sortir de l'hôpital, mais à deux conditions : quitter la maison paternelle et accepter sa mise à la retraite. La voici contrainte à vivre, vagabonde dans la ville, sans le moindre appui.
Bientôt s’étend son réseau de persécuteurs ; sans cesser d’être familiale, sa question devient sociale. En désaccord avec les directrices d'école et les autorités de l'Éducation, Iris donne son point de vue critique sur la fonction enseignante, le système d'enseignement, les dangers liés à l'intrusion des catholiques dans la laïcité de l'école uruguayenne.
Quel rapport établir entre le crime (qui lui fait dire à la police : « Je l'ai tué, c'est mon père ») et ce délire en deux scènes par lequel elle essaie vainement de s'expliquer ?
Iris Cabezudo fut, en Uruguay, ce que furent les sœurs Papin en France, l’instituteur Wagner en Allemagne, James Tilly Matthews en Angleterre : non seulement un de ces rares cas fondateurs de la psychiatrie mais une de ces affaires qui ne cessent d’interroger le social comme tel.

Camille Claudel, l'ironique sacrifice

Danielle Arnoux
EPEL 2001 / ISBN n°2908855607 / 334 p. / 35 euros.
24 illustrations

L'œuvre de Camille Claudel cesse au moment de son délire. Quelle est donc l'articulation entre sa création et sa " folie, absence d'œuvre " (M. Foucault) ? En étudiant les dernières grandes sculptures, L'âge mûr, œuvre de la rupture avec Rodin, Clotho, cri d'un deuil, Persée et la Gorgone, défaut de la protection, on voit la persécution porter sur l'appropriation de l'œuvre. Répondant à une demande de sacrifice, Paul Claudel écrit la Trilogie ; chez Camille, la folie prend l'œuvre comme objet d'un ironique sacrifice.

Ernst Wagner, Robert Gaupp, un monstre et son psychiatre

Documents réunis et présentés par Anne-Marie Vindras
EPEL 1996 / ISBN n°2908855216 / 410 p. / 30 euros.
Traduction Claude Béal, Thierry Longé et Anne-Marie Vindras

Les drames que nous a laissés Ernst Wagner permettent de faire une lecture nouvelle de ses actes de bestialité (Sodomietaten), ceux-là mêmes qui ont déclenché son délire de persécution. Pendant douze ans il supporta ce délire sans mot dire ; il finit pourtant par tuer sa femme et ses quatre enfants, leur épargnant ainsi d'avoir un mari et père criminel, et neuf personnes dans le village de Mühlhausen qui, selon lui, murmuraient sur son passage, à propos de sa bestialité.

Politiquement fou : James Tilly Matthews

John Haslam, Roy Porter, David Williams
EPEL 1996 / ISBN n°2908855232 / 164 p. / 20 euros.
Traduction Hélène AllouchPréface de Lucien Favard

1810 : publiée en Angleterre, cette toute première monographie clinique approfondie répond à une investigation administrative concernant les (mauvais ?) traitements ayant cours dans les maisons de fous de l'époque. Le psychiatre, John Haslam, se fait l'avocat de la défense de l'institution ; le patient, J. Tilly Matthews, est une cause célèbre soulevant des controverses diagnostiques.
À l'appui de ses convictions, Haslam décrit avec précision la folie de Matthews, la bande de ses persécuteurs et leur diabolique machine à tisser les flux, la conspiration machiavélique qui règne dans les souterrains de Londres. Au fur et à mesure de la lecture, l'univers " imaginaire" de Matthews apparaît être l'écho des réalités de son temps et de sa propre histoire.

Marguerite, ou l'Aimée de Lacan

Jean ALLOUCH
EPEL 1994 / ISBN n°2908855127 / 680 p. / 45 euros.
Postface de Didier Anzieu, 2ème édition revue et augmentée

En 1986, le psychanalyste Didier Anzieu confirmait que sa mère avait été Aimée, cette femme dont Lacan écrivit la folie dans sa thèse. Par la grâce de cette identification, des noms pouvaient sortir comme de l'ombre, des lieux, des dates venaient prendre leur place ; ainsi s'ouvrait la possibilité d'une lecture enfin critique de la seule monographie clinique jamais écrite par Lacan.
L'ouvrage comporte les documents d'époque. On y trouve aussi la correspondance Allouch/Anzieu qui accompagna l'écriture du livre. Le dernier mot revient à Anzieu en sa postface.

Louis Althusser récit divan

Jean Allouch
EPEL 1993 / ISBN n°2908855089 / 70 p. / 10 euros.

Le philosophe Clément Rosset crut devoir se faire le pourfendeur de la soumission intellectuelle et associer nommément Lacan et ses élèves aux égarements de l'imposture althussérienne. Quelle place Lacan a-t-il tenue dans le cas Althusser ? Quel statut accorder au meurtre de sa femme ? Que visent à opérer les publications posthumes ?

Louis II de Bavière selon Ernst Wagner, paranoïaque dramaturge

Documents réunis et présentés par Anne-Marie Vindras
EPEL 1993 / ISBN n°2908855100 / 184 p. / 19 euros.

Pour avoir tué sa femme et leurs quatre enfants, massacré neuf habitants du village souabe de Mühlhausen, Ernst Wagner reste le plus célèbre des paranoïaques allemands, tant auprès d'une population horrifiée par les crimes de " Monsieur l'instituteur " que pour la communauté psychiatrique qui en fit un cas paradigmatique, comme tel pris en compte par Lacan.
L'ouvrage propose deux présentations cliniques inédites en français de Robert Gaupp, psychiatre entiché du cas, ainsi que Délire, pièce en trois actes écrite par Wagner, qui met en scène la folie de Louis II de Bavière et les rapports du roi avec son psychiatre jusqu'à leur aboutissement dans une mort commune.

La 'solution' du passage à l'acte, Le double crime des sœurs Papin

Francis Dupré
EPEL 1984 / ISBN n°épuisé / 270 p.

Lorsque la folie se manifeste réduite au seul passage à l'acte, curieusement, elle importe. Ainsi, le double crime des sœurs Papin a-t-il suscité l'intérêt des Tharaud, Éluard, Peret, Man Ray, Sartre, Genet, Houdyer, Papadakis et d'autres, tout récemment encore.
À quoi le passage à l'acte ferait-il " solution " ? Cette question fut au départ du frayage de Jacques Lacan : les sœurs Papin le provoquent à modifier la réponse donnée dans sa thèse et le conduisent au seuil de l'invention du stade du miroir.
L'hétéronyme Francis Dupré couvre les noms de J. Allouch, É. Porge et M. Viltard ; il vient de Francis Ponge et de sa Fabrique du pré.