15-11-1907 Jung Freud

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15. XI. 07

Vienna (1) IX, Berggasse 19.

Kjære venn og kollega,

Det er alltid for meg en start på dagen fornøyde når postkontoret bringer invitasjonen til møtet i din association som bærer mitt navn; malheureusement le temps ne suffit alors en général pas pour que je parvienne à y participer au moyen du train rapide. Les nouvelles au sujet de vos événe­ments intérieurs sont rassurantes à entendre; le transfert en provenance de la religiosité me semblerait particulièrement fatal; il ne pourrait en effet se terminer que par la démission, à cause de la tendance générale des hommes à tirer sans cesse de nouvelles copies des clichés qu’ils portent en eux. Je ferai donc mon possible pour me faire connaître comme inapte à servir d’objet de culte, et vous pensez probablement que je m’y suis déjà mis. Dans ma dernière lettre, j’étais irrité et j’avais mal dormi; peu après, je me suis ressaisi et je me suis dit des choses semblables à celles que me propose votre lettre, à savoir que nous avons de bonnes raisons d’être satisfaits. En outre nous ne voulons pas tomber dans l’erreur de juger la fermentation uniquement d’après les bulles qui montent dans la littérature. Les transformations les plus décisives ne se ratta­chent pas obligatoirement à telle ou telle publication expresse. Un jour on s’aperçoit qu’elles sont accomplies.

La publication de Binswanger, provenant d’une forteresse de l’orthodoxie, sera remarquée en Allemagne malgré le texte pacificateur de l’oncle qui l’accompagne. Avec ce jeune homme vous avez en tout cas fait une passe brillante. Croyez-vous qu’il soit assez résistant et endurant pour fonder de son côté un foyer d’infection?

J’ai reçu hier un travail de Warda (2), tiré du volume d’hom­mages à Binswanger sen. Il a de la bonne volonté, dont il a déjà fait preuve dans des travaux précédents, mais il semble tout à fait privé de talent; il est de ceux qui, tout seuls, n’avan­cent pas d’un iota, et ainsi le travail fait une impression misé­rable.

Imaginez que je n’ai pas reçu de Näcke le tiré à part de son travail (3), bien que je l’aie exigé dans la correspondance, pas plus d’ailleurs que celui d’Aschaffenburg (4), qui pourtant m’a envoyé la première attaque par politesse. Je serais toutefois bien inconsolable si je ne devais pas entrevoir votre confé­rence du congrès d’Amsterdam.

Il y a quelque temps, un Dr Kutner (5) de Breslau, autrefois assistant de Wernicke, m’a écrit qu’il voulait venir à Vienne chercher son premier enseignement de Psycha. Je lui ai honnête­ment exposé ce que je pouvais fournir en fait d’enseignement en une courte visite, et combien c’est peu, et il n’a plus fait signe depuis lors.

Je dois vous avouer que je ne travaille actuellement à rien; sans doute ça continue à travailler en moi sans interruption. L’essai de Riklin sur les contes devrait à présent être corrigé jusqu’au bout. Den Gradiva n’a vraiment pas de destinées du tout. L’ennuyeux libraire me fait encore attendre les deux nouvelles de Jensen!

Réjouissez bientôt de vos nouvelles votre cordialement dévoué

Dr Freud.

1. Nouveau papier à lettres, à en-tête imprimé : « Vienne ».

2. Wolfgang Warda, membre fondateur de l’Association berlinoise de psychanalyse (1910); la quitta en 1911. Son essai « Zur Pathologie und Therapie der Zwangsneurose » [Pathologie et thérapeutique de la névrose obsessionnelle] se trouve dans : Monatsschrift für Psychiatrie und Neuro­logie, fly. XXII, 1907, supplément.

3. CF. 49 J, n. 2.

4. CF. 43 J, n. 1.

5. Sans doute Robert Kutner (1867-1915), urologue, plus tard à Berlin.